ECZÉMA DYSIDROSIQUE
(dyshidrotic eczema, pompholyx)

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La dysidrose et l'eczéma dysidrosique (ED) correspondent à un eczéma de localisation palmo-plantaire. Dans la dysidrose, les vésicules reposent sur une base non inflammatoire. L'atteinte des bords latéro-digitaux peut être la seule manifestation dans les formes mineures. La confluence des vésicules peut mener à des bulles, puis à de vastes érosions invalidantes. L'ED peut s'étendre à distance des régions palmo-plantaires. L'ED peut être aigü, chronique, quasi-permanent ou évoluer de façon récurrente avec guérison totale entre les poussées. Le handicap social et professionnel peut être particulièrement lourd.
Etiologie : l'eczéma dysidrosique correspond à un symptôme aux étiologies multiples. La cause est souvent difficile à préciser.
On distingue
(I) les ED idiopathiques ou associées à l'atopie, (II) les ED par dermite de contact, (III) les ED causées par un allergène "interne" ou un facteur "microbien" (1, 2). Les causes peuvent être intriquées, par ex. dysidrose atopique + dermite de contact aux détergents.
Commentaires :
- (I) le sujet atopique serait plus exposé aux dysidroses, autres facteurs : le stress d'intensité variable, la chaleur estivale (cf. Cas E et F). L'hyperhidrose est un facteur aggravant reconnu, de même que le travail en milieu chaud et humide. Dans ce contexte, les épidermotests sont souvent non contributifs.
- (
II) l'eczéma de contact peut prendre le masque d'un eczéma dysdrosique en apparence "idiopathique" (2): shampooings (cf. Cas D), gels douche, savons, parfums, crèmes, allergènes professionnels. Il en est de même pour la dermite irritative aux détergents domestiques ou professionnels (cf. Cas B). Les épidermotests avec les produits manipulés peuvent être complétés par une batterie des excipients cosmétiques (laurylsulfate, cocamidopropylbétaïne etc.), par une batterie dermocorticoïde et les antiseptiques (ED iatrogène).
- (III) Les réactogènes "internes" incriminables sont multiples.
Si des épidermotests de la batterie standard ICDRG sont positifs, il est licite de tenter un régime d'exclusion, malheureusement pas toujours couronné de succès :
-
nickel : régime sans nickel, strict et prolongé (2 mois au moins), plus cromoglycate de Na DCI ou disulfiram DCI per os (3), résultat parfois décevant.

 

- chrome, cobalt.
-
baume du Pérou : il peut être à l'origine d'un eczéma dysidrosique d'origine alimentaire : agrumes, arômes, balsamiques, épices comme le curry (4), le paprika ou le thym, conduisant à un régime d'éviction (voir la liste) après test de provocation per os positif.
- les conservateurs, en particulier les
sulfites. Après épidermotest positif au métabisulfite de sodium et test de provocation oral positif, un régime sans sulfites est proposé (8).
Autres réactogènes :
- L'ED d'origine "microbienne" est classiquement associé au
pied d'athlète dermatophytique, parfois intriqué avec un intertrigo bactérien, ou à la tinea pedis vésiculeuse (prélever ses squames pour examen mycologique, surtout si la dysidrose plantaire est unilatérale ++++). La responsabilité d'un foyer infectieux bactérien à distance (ORL ou dentaire) est très controversée.
- on insiste de façon récente sur le rôle du
tabac comme facteur d'entretien de l'ED, des sevrages ont pu aboutir à une disparition totale de dysidroses chroniques (5).
Traitement :
- Symptomatique : dermocorticoïdes de classe I ou II, voire corticothérapie
per os initiale si ED aigü très étendu, percement des bulles dans un bain antiseptique au KMnO4, antibiothérapie per os si surinfection.
- Après éviction adaptée des allergènes identifiés, encourager la correction des
facteurs locaux aggravants :
   *
pieds : chaussettes 100% coton, chaussures tout cuir, éviction des baskets, usage local d'antiperspirants de type chlorure d'aluminium hexahydraté DCI, poudres absorbantes.
   * mains et détergents : port de gants à manchette longue et sous-gants de coton, lavage des mains parcimonieux, au mieux à l'eau froide avec un pain sans savon etc...
- pour les dysidroses rebelles : soutien psychologique et gestion du stress;
ionophorèse, interêt surtout si hyperhidrose (6), PUVAthérapie locale, corticothérapie per os à dose faible < 5mg/j (1), UVA1 à confirmer (7). Exceptionnellement : ciclosporine DCI, methotrexate DCI (à confirmer), azathioprine DCI.

Voir les autres pages concernant l'
eczéma.
Sommaire...


photo n°1

Cas A: Poussées de façon récurrente depuis plus de 5 ans, vésicules palmoplantaires puis pustules évoluant vers une squame-croûte brunâtre. Atteinte des faces latérales des doigts.
(Photos n°1 à 3).

Photo n°2 :
photo n°2

Photo n° 3 (détail, plante droite):
photo n°3

photo n°4

Cas B: Dysidrose et eczéma dysidrosique d'origine professionnelle : intrication d'une hyperhidrose et d'un eczéma irritatif aux détergents (Photo n°4 à gauche).


Cas C: érythème palmaire bien limité parsemé de vésicules, atteinte quasi-permanente depuis 4 mois, pieds indemnes. Sans profession.
(Photos n°5 et 6 ci-dessous).

photo n°5


Photo n° 6 :

photo n°6


Cas D : Eczéma de contact aux shampooings, épidermotests positifs. L'absence d'atopie, le caractère extensif de l'eczéma vers les poignets et le dos des doigts doivent faire éliminer un allergène de contact.
(Photos n°7 et 8 ci-dessous).

photo n°7

Photo n°8 :
photo n°8


Cas E: ci-dessous, homme de 20 ans, examiné fin juillet. Vésicules très prurigineuses des mains associées à une atteinte des orteils.
Cas F : ci-dessous à droite, homme de 18 ans, récidive chaque début d'été depuis 2 ans,  les lésions vésiculeuses confluent en bulles.
Photo n°9


 



Photo n°10


(C) E. PIÉRARD
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Régime sans nickel (d'après [3])

Aliments interdits :

- cuisson dans des ustensiles de cuisine en nickel
- harengs, huitres
- asperges, haricots, champignons, oignons, blé, maïs, épinards, tomates, pois, farine complète
- poires fraiches ou cuite, rhubarbe
- thé, cacao, chocolat
- levure


Régime sans sulfites (conservateurs E220 à E227)

Aliments interdits :

- tous les vins (blancs principalement), champagne, sodas, boissons gazeuses
- filets de morue
- légumes coupés, légumes en sachets (purée de pomme de terre)
- moutarde, vinaigre
- crevettes en boite ou surgelées


(
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Références:
(1) La question du mois : comment prendre en charge les eczémas dysidrosiques idiopathiques ? Ann Dermatol Venereol 1998; 125:463-6.
(2) Guillet MH et coll. La dysidrose : bilan d'exploration de 116 cas. Ann Dermatol Venereol 2000;127:4S113.
(3) Milpied-Homsi. Dysidroses et nickel. GERDA 15ème cours d'actualisation,1994; 95-101.
(4) Lehners-Weber et Brassine. Dysidrose par allergie au curry. La lettre du Gerda. 1995;12, n°4, 75-6.
(5) Giordano-Labadie. Actualités dans le traitement des dermites des mains, p.115-23. in Progrès en dermato-allergologie, GERDA 2001, John Libbey Eurotext Ed.
(6) Odia et coll. Successful treatment of dyshidrotic hand eczema using tap water iontophoresis with pulsed direct current. Acta Derm Venereol 1996;76 : 472-4.
(7) Schmidt et coll. UVA1 irradiation is effective in treatment of chronic vesicular dyshidrotic hand eczema. Acta Derm Venereol 1998;78:318-9.
(8) Birringer C et coll. Dysidrose et intolérance aux sulfites (2 cas). La lettre du Gerda. 1995;12 n°2, 27.


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